| Abdelouahed 
      Souheïl n’aura pas survécu au Rapport Lachgar sur le scandale du CIH. Le 
      départ de M. Souheïl a tout l’air d’un limogeage. Le remplacement de 
      l’ex-P-dg de cette banque tant décriée, mercredi 7 février, par le 
      directeur de l’ONCF, Mohamed El Alej, s’est fait d’une manière précipitée. 
      M. Souheïl n’aura passé que 3 ans à la tête du CIH. Une période 
      relativement courte pour une mission qui était loin d’être de tout repos. 
      Alors pourquoi Souheïl a-t-il été éjecté de son fauteuil de président? 
      A-t-il échoué dans sa mission de gestionnaire? Une chose est sûre: Le fait 
      que les pouvoirs publics interviennent récemment pour sauver le CIH d’une 
      faillite certaine en y injectant près de 6 milliards de Dhs a été perçu 
      comme un échec dans le management de cet établissement financier. C’est ce 
      qui a conduit justement à la constitution en juillet dernier d’une 
      commission d’enquête parlementaire sur le CIH avec le rapport explosif que 
      l’on sait dont les révélations ont fait beaucoup de vagues.
 Banqueroute Il a fallu 
      donc après cela un signal fort sur le plan psychologique pour rassurer 
      tout le monde quant à l’avenir du CIH. Mais doit-on pour autant faire 
      assumer à Abdelouhed Souheïl une banqueroute qui a mis près de 20 ans pour 
      éclater au grand jour et où ses prédécesseurs ont une grande part de 
      responsabilité? Portant une double casquette, celle de militant du PPS et 
      celle de gestionnaire de banque, M. Souheïl a-t-il collaboré pleinement 
      avec la commission d’enquête sur le CIH ? Certains membres de cette 
      commission ont accusé l’ex-patron du CIH d’avoir fait dans la rétention de 
      l’information. Par ailleurs, ses commentaires sur le rapport Lachgar n’ont 
      pas été appréciés, notamment sa déclaration selon laquelle le secret 
      bancaire a été violé par la commission.Par ailleurs, les présidents de 
      banques affiliés au GPBM (groupement professionnel des banques du Maroc) 
      ont tenu il y a quelques jours une réunion extraordinaire. À l’ordre du 
      jour, la situation préoccupante du CIH. comme par hasard Souheïl était 
      absent.
  • Mohamed El 
      Alej
 “C’est 
      une banque qui devient de moins en moins viable” dit-on à l’unisson. M. 
      Souheïl n’aura pas droit au soutien de ses pairs. Il est lâché. Fait 
      aggravant, la signature par M. Souheïl, en plein travail de la commission 
      d’enquête présidée par M. Lachgar, d’un accord avec le groupe Dounia PLM. 
      Un accord qui n’a pas plu à plus d’un. “Au lieu de récupérer ses créances 
      sur M. Alami, le CIH a accepté de participer dans le capital de Dounia 
      PLM”, explique un observateur.
 Curieuse façon aussi de dire adieu à un 
      patron qui s’en va. Le personnel du CIH a fêté, aux abords des bâtiments 
      de la banque, le départ de M. Souheïl dans la joie et l’allégresse allant 
      jusqu’à cotiser pour faire venir un orchestre de la Dekka Marrakchia. 
      Ingratitude ou soulagement? Une chose est sûre:
 le nouveau Pd-g du 
      CIH, jusqu’ici directeur général de l’ONCF, n’a rien d’un tendre. C’est un 
      bulldozer, qui s’est taillé une réputation de “nettoyeur” des entreprises 
      publiques en difficulté.
 Proche de Mohamed Kabbaj, conseiller de S.M le 
      Roi, M. El Alej a appliqué avec succès et sans état d’âme ses méthodes de 
      gestion à la CTM dont il a fait une entreprise viable et privatisable, 
      mais aussi à l’ONCF qu’il a soumis à un plan social draconien. Avec à la 
      clé des départs négociés et des licenciements…C’est d’une opération de 
      redressement et surtout d’une action rigoureuse de recouvrement des 
      créances perdues qu’a besoin aujourd’hui le CIH pour sortir de la crise.
 Rapport Le conseil 
      d’administration de la banque s’est tenu, jeudi 8 février, en présence du 
      nouveau et de l’ancien P-dg pour la passation de pouvoirs.Abdelouahed 
      Souheïl reste, tout compte fait, un homme qui a fait ce qu’il a pu à la 
      tête d’une boîte plombée par des scandales financiers d’un certain Maroc. 
      En un mot, un homme vaincu par les défaillances graves d’une institution 
      déchue.
 Le limogeage de Abdelouahed Souheïl n’est qu’un épisode, 
      certes inattendu, mais qui vient rappeler la gravité du dossier CIH. Un 
      dossier qui connaîtra des suites judiciaires. Le ministre de la justice 
      Omar Azzimane n’a pas encore saisi la cour spéciale de justice au sujet du 
      scandale du CIH. C’était pourtant dans l’ordre des choses, puisque le 
      gouvernement, lors de son conseil du jeudi 25 janvier, a mis le rapport de 
      la commission parlementaire sur le CIH entre les mains de la justice. Un 
      rapport gros de 270 pages, bourré de révélations sur les délits financiers 
      qui ont miné cette banque pendant plusieurs décennies. Un rapport qui a 
      fait l’effet d’une bombe dans l’opinion publique et dans les milieux 
      politique et économique. Les gens attendent avec impatience la suite qui 
      sera donnée à ce scandale retentissant aux ramifications complexes.
 Le 
      ministère de la justice, après qu’il s’en est emparé, n’a pas non plus 
      remis le rapport Lachgar à la brigade nationale de la police judiciaire 
      (BNPJ) à Casablanca. Certes, cette dernière a interrogé, lundi 5 février, 
      cinq anciens cadres moyens du CIH. Ne figure parmi eux aucun ancien patron 
      de cette institution épinglés par les membres de la commission 
      parlementaire. Les auditions des cinq ont porté sur des volets du dossier 
      CIH suite à la plainte déposée par eux en 1999 contre l’ex-patron du CIH, 
      Abdelouahed Souheïl. Celui-ci avait en effet procédé à leur licenciement 
      -qualifié d’abusif par les intéressés- en raison de certains dossiers de 
      crédits jugés sujets à caution dont ils avaient la charge avant son 
      arrivée à la tête du CIH.
 Tout porte à croire que la BNPJ pourrait, à 
      partir de ces auditions, mener sa propre enquête sur l’ensemble des 
      scandales du CIH sans se baser sur le rapport Lachgar. Ce dernier en est 
      encore au stade d’étude au ministère de la Justice, notamment au niveau de 
      la direction des affaires pénales. Ici, une kyrielle de juristes et de 
      spécialistes décortique le rapport de la commission dossier par dossier. 
      Le ministre veille personnellement au grain.
 Infractions Le travail 
      est énorme, guère facile. Car il s’agit d’abord de qualifier sur le plan 
      juridique les différentes infractions relevées par le rapport Lachgar et 
      décider ensuite de la procédure idoine à retenir pour le traitement de ce 
      dossier. Alors, quelle procédure suivra l’affaire du CIH? Il est probable 
      qu’elle ne soit pas remise à la BNPJ dont les techniques d’investigation, 
      plus pointues et scientifiques, sont du reste différentes de celles d’une 
      commission d’enquête parlementaire.Dans ce cas, le ministère de la 
      Justice peut très bien remettre directement le dossier au juge 
      d’instruction de la cour spéciale de justice qui, le cas échéant, est 
      susceptible de faire appel à la police judiciaire de Casablanca ou de 
      Rabat pour approfondir l’enquête sur tel ou tel cas. On parle aussi d’une 
      autre éventualité, que la Cour spéciale de justice, juridiction 
      d’exception, prenne des locaux à Casablanca dans le cadre du scandale du 
      CIH. En fait, les irrégularités et les dépassements consignés dans le 
      rapport Lachgar sont en fait des secrets de Polichinelle. Ils avaient fait 
      régulièrement l’objet, plusieurs années avant la création de la commission 
      parlementaire, de divers rapports rédigés aussi bien par l’inspection du 
      CIH que par les services de Bank Al Maghrib. Des rapports qui ont été 
      remis en leur temps à qui de droit. Mieux la BNPJ a même enquêté sur 
      certains dossiers délictueux contenus dans le rapport 
      Lachgar.
 Seulement voilà, les rapports de Bank Al Maghrib ou de 
      l’inspection du CIH, au lieu de déboucher à l’époque sur des poursuites 
      judiciaires, ont été rangés dans les tiroirs. Certainement par manque de 
      volonté politique. Et voilà qu’en 2001, à la faveur de l’avènement de 
      l’alternance et surtout du nouveau règne, le dossier CIH sort de l’ombre. 
      Et de quelle manière.
 Et voilà aussi que les événements se précipitent. 
      La volonté d’assainir ne fait aucun doute.
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